Chaosmos à Tripoli

Emmanuel Haddad
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Chaosmos à Tripoli

Sur l’ancienne ligne de démarcation entre deux quartiers ennemis de Tripoli, au Liban, les combattants d’hier repeignent les façades aux couleurs du parti local. Peut-on effacer 30 ans de conflit d’un coup de pinceau?

Pour déguster le falafel libanais au meilleur rapport qualité-prix de Tripoli, il faut dépasser le rondpoint Abou Ali, traverser le fleuve éponyme et entrer dans le quartier Bab el-Tebbaneh, où Abou Ali —un autre— écrase des boules de pois chiches frais, qu’il lorgne de ses yeux strabiques. Depuis la gare de bus centrale de cette ville de plus de 300 000 habitants, le trajet est court, mais chargé d’histoire. Après l’avenue Rafic Hariri, du nom du premier ministre assassiné le 14 février 2005, on aperçoit un ilot de terre sèche surmonté d’une sculpture singulière: une voiture carbonisée, la carcasse couleur rouille et l’ossature torsadée. En face, les fidèles qui se rendent à la mosquée al-Taqwa y jettent un regard oblique et ravalent leur salive, avant de disparaitre dans l’enceinte de la salle de prière.

Le 23 aout 2013, le rondpoint Abou Ali s’est paré d’un manteau de fumée gris et noir après qu’une détonation eut soufflé les murs du lieu saint. Au même moment, un véhicule piégé a explosé au pied de la mosquée al-Salam, à l’autre bout de la ville. Quelque 42 personnes sont mortes et au moins 500 autres ont été blessées dans ce double attentat, le plus meurtrier qu’ait connu le Liban depuis la fin de la guerre civile (1975-1990). À la suite de l’insurrection syrienne contre le régime de Bachar-al-Assad, qui a débuté en mars 2011 et qui s’est transformée en guerre civile, Tripoli a reproduit par procuration le conflit voisin, dont les enjeux réveillent des plaies ouvertes ici 30 ans plus tôt. Des affrontements chroniques opposent ainsi le quartier sunnite Bab el-Tebbaneh, rangé aux côtés des insurgés syriens, au quartier alaouite Jabal Mohsen, dominé par le Parti arabe démocratique (PAD), lui-même allié au régime de Damas depuis les années 1980.

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Ces deux quartiers, les plus marginalisés de la ville, sont aussi le lieu d’expression privilégié du conflit politique national. Depuis l’assassinat de Rafic Hariri, le Liban est déchiré entre le «mouvement du 14 mars», une coalition de partis chapeautée par le fils Saad Hariri, et le «mouvement du 8 mars», l’alliance pro-Hezbollah (littéralement «Parti de Dieu»). Plutôt que de s’affronter à Beyrouth, vitrine d’un Liban tourné vers l’avenir où se déroulent des négociations civilisées, les deux rivaux laissent libre cours à leur violence à Tripoli—où armes et munitions sont distribuées aux groupes des deux quartiers. La rue de Syrie, qui les sépare, est devenue une véritable ligne de démarcation. Seuls les chars de l’armée s’y aventurent, sans jamais trop s’y attarder.

Les habitants des deux quartiers, eux, ont pris l’habitude d’égrener le temps au rythme des rounds de combats répétitifs, qui ont fait plus de 125 morts et des milliers de blessés ces quatre dernières années. Entre chaque round, ils tentent de retrouver une vie normale. Leur quotidien transpire le «chaosmos». Ce mot-valise, forgé par l’écrivain irlandais James Joyce, rapproche l’ordre et le désordre, le chaos et le cosmos, pour rappeler qu’ils ne sont pas des contraires, mais les parties d’un continuum plus large. Ainsi, à chaque accalmie de violence, il n’est pas rare de voir des enfants se rendre à l’école entre deux voitures calcinées. Ou encore un combattant de 30 ans, comme Rami, lâcher son fusil de sniper pour aller travailler à la clinique où il est infirmier. Avant d’être des combattants, les porteurs de fusils sont en effet des pères, des marchands de légumes ou des enfants désœuvrés, qui disent tirer pour défendre leurs familles. Mais après le double attentat du 23 aout 2013, les rounds ont gravi les échelons de l’horreur. Peu à peu, les échanges de tirs entre combattants ont laissé place à une violence aveugle, à teneur confessionnelle. De nombreux civils alaouites ont été tabassés, poignardés; d’autres ont été retrouvés avec une balle dans la jambe ou sans vie.

La rue de Syrie est devenue une véritable ligne de démarcation. Seuls les chars de l’armée s’y aventurent, sans jamais trop s’y attarder.

Les Tripolitains ont donc constaté avec soulagement que l’annonce du cessez-le-feu, le 1er avril 2014—soit moins d’un an plus tard—, n’était pas une mauvaise blague. La mosquée al-Taqwa a rouvert ses portes en mai. La carcasse d’auto immortalisant l’attentat aurait sa place dans une exposition du sculpteur César Baldaccini, dont les voitures compressées se voulaient un doigt d’honneur à la société de consommation. Mais à Tripoli, le défi est de maintenir les esprits alertes contre tout retour de la violence. La sculpture cramoisie est une métaphore de la goutte qui fait si souvent déborder le vase, catapultant la ville du cosmos au chaos, de la prospérité à la ruine.

  • Un combattant du quartier, sous le commandement d’Oussama Mansour, devant le mur peint par Saloua, la femme de ce dernier. L’appartement est situé sur la ligne de front, la rue de Syrie. Les hommes l’occupent durant les affrontements.
  • Déploiement militaire, rue de Syrie. Depuis le double attentat du 23 aout 2013, l’État libanais tente de mettre en œuvre un plan sécuritaire afin de ramener le calme dans la ville.

Dans son restaurant encastré entre deux échoppes de garagistes, à l’entrée de l’ancienne Porte de l’or, Abou Ali plonge des boules de pois chiches dans l’huile, un œil sur la surface bouillonnante, l’autre sur la conversation animée devant son étal de falafels. «Le retour de Saad Hariri, c’est comme une injection de morphine. Les symptômes de la maladie vont disparaitre un instant... Puis revenir avec encore plus de violence!», lance-t-il à qui veut l’entendre. En cet après-midi brulant de l’été 2014, le Liban vient d’apprendre le retour du fils prodigue de l’ex-premier ministre, après trois ans d’absence passés entre Paris et Riyad. Le politicien sunnite, dont la fortune s’élève à 3,3 milliards$, a les moyens à lui seul de relancer l’économie de la ville—à 80% sunnite—tenue par son parti, le Courant du Futur. Mais malgré ses valises remplies d’argent, Saad Hariri arrive trop tard pour convaincre les habitants du quartier. «Le conflit avec Jabal Mohsen est peut-être fini, mais une autre guerre a commencé, une guerre économique», s’enflamme Ahmad, client et ami d’Abou Ali. «Regarde autour de toi, il n’y a pas de boulot!», dit-il, le regard tourné vers un enfant vêtu de haillons, qui tire une brouette, remplie de ferraille.

Les deux hommes s’adressent un rictus entendu quand ils parlent des politiciens du Courant du Futur: «Après la trêve, ils sont venus se faire prendre en photo la rue de Syrie, des promesses plein la bouche, puis on ne les a jamais revus!» À la suite de l’euphorie du cessez-le-feu du 1er avril 2014, où des habitants de Bab el-Tebbaneh sont entrés à Jabal Mohsen sous une pluie de pétales de fleurs et de grains de riz, le quartier est entré dans une période ambigüe. Réjoui à l’idée que ses enfants puissent aller à l’école sans craindre une balle perdue, Ahmad n’en oublie pas moins la misère galopante. «Pendant le ramadan, mon fils a vendu des jus de fruits. Depuis, il ne fait plus rien», dit-il, la cigarette vissée aux lèvres. De sa main nerveuse, il sort son téléphone et brandit une photo de son ainé, en tenue de combat, l’arme au poing et l’air grave. Sur la photo suivante, le voici de nouveau en civil et souriant, aux côtés du fils d’Abou Ali. Lui aussi combattait contre les habitants de Jabal Mohsen. Quand une balle de sniper l’a fauché sur son scooteur l’an dernier, il est devenu martyr, à 20 ans. Son visage recouvre désormais les murs du quartier, à l’instar de celui de dizaines de jeunes combattants. Qu’ils soient morts pour défendre leurs familles ou parce qu’ils ont été embrigadés dans des combines politiques qui leur échappaient, leurs noms s’ajoutent à la longue liste de victimes d’une guerre qui n’en finit plus.

Passé le fleuve Abou Ali au lit souillé par les déchets, on reconnait Bab el-Tebbaneh à ses immeubles aux façades criblées d’impacts de balles. Il n’en a pas toujours été ainsi. «C’était un quartier bourgeois, avec ses cinémas, ses banques. La rue de Syrie était un marché ouvert réputé dans toute la région», explique Bruno Dewailly, spécialiste de Tripoli. Bab el-Tebbaneh était surnommée Bab el-Dahhab, «la Porte de l’or». «En 1955, la crue du fleuve a poussé des centaines d’habitants à se reloger dans le quartier. À partir de là, sa paupérisation a commencé», ajoute le chercheur de l’Institut français du Proche-Orient. Il y a près de 60 ans, une averse torrentielle s’est en effet abattue sur Tripoli. Le fleuve Abou Ali s’est transformé en un «mur d’eau» que certains disaient alors haut de dix mètres. Quelque

160 personnes ont disparu sous les flots, 2 000 se sont retrouvées sans abris. Les habitants apprendront par la suite que cette pluie exceptionnelle était née de la présence d’une «goutte d’air froid» à une période d’air chaud et humide. Ils n’oublieront jamais la leçon. Aux abords du fleuve Abou Ali, un ciel dégagé est, depuis, abordé avec circonspection, comme s’il annonçait déjà un orage à venir.


  • Une mère de dix enfants sur son balcon, en face de Jabal Mohsen.

En retournant le long du fleuve Abou Ali, on pénètre dans un enchevêtrement de ruelles pavées débordant d’arômes et de cris: c’est le souk el-Qameh, le marché aux légumes du quartier Bab el-Tebbaneh. Pendant les rounds, ses étals étaient fermés. Son entrée, bloquée par des cageots, était limitée aux combattants, concentrés autour du «zaim», le chef de quartier, qui distribuait ordres, armes et munitions. Au-dessus des toits du souk, les snipers de Jabal Mohsen visaient le moindre centimètre carré de peau qui dépassait. Mais dès qu’ils le pouvaient, les marchands rouvraient boutique. Une partie de leurs recettes atterrissait dans les mains du «zaim», Ziad Alouki, un ancien boucher. En retour, celui-ci prenait en charge les soins de santé d’un parent ou les frais de scolarité d’un enfant. Une économie de guerre financée, entre autres, par les membres du Courant du Futur, qui fournissaient un salaire aux «zaim» et des armes à leurs combattants.

«Pendant des années, nous avons combattu pour les hommes politiques. Tout à coup, ils nous abandonnent aux mains de l’armée et nous demandent de trouver un travail. Mais lequel?», feint de s’interroger Abou Saad, un ex-combattant qui se languit dans une pièce exigüe, avec sa femme et leurs quatre enfants. Ancien boucher, il a reçu une balle au poignet qui l’empêche désormais de tenir un couteau. Il a dû fermer sa boucherie. L’homme râblé et en sueur n’a rien contre la paix, sauf qu’elle ne nourrit pas sa famille. «Je suis heureux de la fin des affrontements. Mais nous avons été manipulés. Le Courant du Futur a vendu notre quartier contre son entrée au gouvernement avec le Hezbollah», dénonce-t-il. En février 2014, deux mois avant le cessez-le-feu du 1er avril à Tripoli—qui s’est conclu par des descentes de l’armée dans les deux quartiers ennemis—, un gouvernement de coalition a été formé entre le Hezbollah et le Courant du Futur. D’un regard de bête blessée, Abou Saad fixe son poignet, et prévient: «Nous gardons nos fusils, au moins jusqu’à ce qu’on nous propose une amnistie.»

Au bout du long couloir du souk el-Qameh, où la lumière ne pénètre que par les trous des balles de snipers dans le toit en tôle, la rue de Syrie s’annonce, surprenante. Grise, détruite et déserte pendant de longues années, elle ressemble désormais à une ile grecque, avec ses façades blanc et bleu ciel réverbérant la lumière du soleil. Le choc visuel est intense. Du cœur du chaos a ressuscité une ville d’apparence normale. Les jeunes qui repeignent les immeubles ont la gueule des beaux jours et les paroles apaisées: «On est en train de redonner un beau visage au quartier. Je suis content que Saad Masri et les autres chefs du quartier soient en prison. On en avait assez!», témoigne Mohammad, en fumant son narguilé sous un échafaudage. En face, un portrait de Saad Masri, chef charismatique de Bab el-Tebbaneh, est resté accroché au mur. Le visage barbu de ce leader, désormais en prison aux côtés du «zaim» Ziad Alouki, semble soudain incarner le passé.

  • Lorsque les violences éclatent, les écoles ferment et les enfants doivent rester chez eux. Ghadir aide les plus jeunes à faire leurs devoirs.

Fin septembre 2014, deux mois après le début de la rénovation de la rue de Syrie, le quartier vit un chaosmos d’un nouveau genre. Les murs et les couleurs en disent long sur les nouveaux paradoxes qui déchirent ses habitants. «Lui, c’était Faisal Aswad, l’un des principaux chefs de Bab el-Tebbaneh», dit le tailleur Abou Gharib, en montrant un visage peint sur le mur, en face de sa boutique de couture. Le 23 septembre dernier, assis à une terrasse de café, il a reçu une rafale de balles en provenance d’une Mercedes. Deux semaines plus tôt, un résident du quartier succombait à ses blessures après avoir été attaqué par un groupe d’inconnus. Déjà, la presse locale réveille les vieux démons de Bab el-Tebbaneh en évoquant le retour de la violence. Mais cette fois, l’accent est mis sur la confession chiite des deux victimes, et le terme «islamiste» accompagne le nom du quartier malfamé. Abou Gharib balaye les allusions médiatiques d’un éclat de rire et pointe son doigt vers un arbuste planté au coin de la rue: «Abou Taj, le chef de la ruelle voisine, a fait remplacer le muret érigé contre les snipers par des plantes!», dit-il, pour signifier la nouvelle ère pacifique qui règne à Bab el-Tebbaneh.

L’enthousiasme n’est pas unanime pour autant. Surtout à l’égard du fils de l’ex-premier ministre et chef du parti du Courant du Futur. À quelques pas du salon de narguilé improvisé, un jeune en fauteuil roulant balaye d’un regard circonspect les façades couleur méditerranée de Bab el-Tebbaneh: «On s’en fout que Saad Hariri fasse repeindre les murs. Ce n’est pas ça qui va me permettre de payer mes médicaments!», s’exclame-t-il. Victime d’une balle dans la hanche, il traine une poche à urine à sa ceinture. Au-dessus de sa tête, un portrait géant de Saad Hariri, tout sourire, est légendé: «Shebab min Tebbaneh» («Jeunes de Tebbaneh»). La rue de Syrie, jadis zone interdite, a désormais fière allure avec ses murs aux couleurs du Courant du Futur. Mais le lifting n’a pas tenu au-delà. Les ruelles insalubres du quartier, où les combattants avaient érigé des murets et creusé des trous d’un immeuble à l’autre pour tromper les snipers, demeurent inchangées. Ou presque.

«Nous gardons nos fusils, au moins jusqu’à ce qu’on nous propose une amnistie.»

L’arbuste qui cache la forêt? Dans la rue parallèle, derrière le quartier général des anciens combattants du chef de Bab el-Tebbaneh, Saad Masri, un passage étroit conduit vers une tout autre réalité. Là, un marché couvert est protégé par des hommes barbus, vêtements noirs et flingue à la ceinture, le regard scrutateur sous un drapeau du djihad. Leur jeune chef, Oussama Mansour, est l’ennemi public numéro un dans les médias libanais. Il faut dire qu’il affiche son attirance pour le groupe État islamique, l’organisation armée la plus violente de la région, qui considère les chiites comme des apostats... dans un pays dominé par le Hezbollah, parti chiite engagé militairement contre le groupe État -islamique en Syrie! Oussama Mansour est ainsi perçu comme le premier suspect du meurtre de l’un des principaux chefs de Bab el-Tebbaneh, Faisal Aswad, sans qu’il y ait eu d’enquête judiciaire pour prouver sa culpabilité. Le jeune leader islamiste préfère insister sur l’aspect défensif de sa lutte: «Nous avons chassé l’armée du quartier dans le seul but de nous protéger. Mais dès qu’un sunnite se défend, il est qualifié de terroriste, alors que pour le Hezbollah, on parle de résistance», dit-il, ne cachant pas son opposition à l’armée libanaise, qu’il juge aux ordres du «Parti de Dieu». Les mains chargées de légumes, des mères de famille voilées le saluent et il ne manque pas de répondre, sourire aux lèvres, ses doigts triturant une chevalière surmontée de l’inscription «Allah». À ses côtés, sa petite fille est couvée par deux géants barbus et armés, soudain changés en tontons gâteaux. 

Le spectre des affrontements entre Jabal Mohsen et Bab el-Tebbaneh étant éloigné, le cosmos s’apprêtait à reprendre le pas sur le chaos. Mais l’ombre du conflit en Syrie et en Irak, désormais concentré autour du groupe État islamique, plane sur Tripoli, qui, encore une fois, se fait la caisse de résonance des enjeux de la région.

Le jour tombe et les boulettes de pois chiches se font rares dans la poêle d’huile d’Abou Ali. Défiguré par les tics nerveux, Ahmad fait part de tout le bien qu’il pense du groupe État islamique, une alternative pour beaucoup d’habitants de Bab el-Tebbaneh, qui se sentent abandonnés par le Courant du Futur. Abou Ali le reprend: «Nous sommes des gens pacifiques, nous n’approuvons pas ce que fait l’État islamique avec les chrétiens d’Irak. Mais les sunnites sont menacés dans toute la région et n’ont d’autre choix que de se défendre.» Ahmad sort une cigarette, l’allume, regarde les échoppes pleines de suie fermer boutique en face de lui. Un rictus éclairant son visage émacié, il improvise soudain une mélodie comique et mélancolique: «Ma baddi Daech, ma baddi finish, badde ’ich!» («Je ne veux pas de l’État islamique, je ne veux pas en finir, je veux juste vivre!») 


Journaliste indépendant, Emmanuel Haddad s’est installé au Liban il y a un an, après avoir vagabondé entre la France, l’Espagne et le Niger. Il travaille pour des médias francophones (Le Courrier, La Liberté, Sept, Altermondes, L’Express, Alternatives Internationales) et s’intéresse aux enjeux politiques, sociaux et humanitaires du pays du cèdre.

Photos: Marion Lise Normand