Après le bac vert, le bac brun?

Pierre-Olivier Pineau
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Économie environnementale

Après le bac vert, le bac brun?

En 2020, il sera interdit d’enfouir des matières organiques au Québec. Or, d’énormes progrès restent à faire en ce qui concerne la gestion quotidienne des déchets. Les Québécois sont-ils vraiment prêts pour le bac brun? 

Le bac vert est un puissant symbole environnemental. Entre 2002 et 2010, les Québécois ont presque doublé la quantité de matières mises en valeur par la collecte sélective, passée de 48 à 83 kg par personne, par an. Il y a de quoi être fiers: le bac vert déborde!

Ce que l’on oublie, par contre, c’est que pendant cette même période, au Québec, la quantité d’ordures ménagères «éliminées» (enfouies ou incinérées) a grimpé de 252 à 360 kg par personne sur une base annuelle, selon Statistique Canada. Si cette hausse fulgurante ne trouve pas d’explication évidente (elle est peut-être due à des changements méthodologiques dans la comptabilisation des données), il reste que la moyenne annuelle canadienne, elle, était de 272 kg en 2010. Des facteurs culturels et fiscaux, de même que des programmes de compostage peuvent être à l’origine de cette différence.

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Dans les collectes municipales, la matière organique compte pour plus de 50% de ce qui est enfoui. Or, ce sera tolérance zéro dès 2020, selon le plan d’action de la Politique québécoise de gestion des matières résiduelles. Le gouvernement a déjà mis en place un programme de traitement des matières organiques par compostage et biométhanisation (production de gaz naturel renouvelable), mais, jusqu’à présent, seulement neuf municipalités sur une centaine ont confirmé leur participation.

Signe que la tendance se renverse peut-être, 304 kg d’ordures ménagères per capita ont été éliminés en 2012, ce qui constitue une légère baisse par rapport aux statistiques de 2010. Il demeure que les cancres de la poubelle enfouissent deux fois plus de déchets que les premiers de classe de la province: la même année, le Sherbrookois moyen n’a destiné à l’élimination que 190 kg d’ordures, contre plus de 382 kg pour le résident de Terrebonne-Mascouche.

Le secret de Sherbrooke? Trois bacs. Le brun, pour toutes les matières compostables. Le vert, pour le recyclable. Et le noir, pour le reste. Si certains quartiers de Montréal ont emboité le pas, les projets à grande échelle demeurent rares, et la résistance se fait de plus en plus entendre—tant pour l’ajout d’un bac que pour les installations de traitement des matières organiques.

Nous mobiliserons-nous sur la question des poubelles? Le risque que le sujet soit enfoui sous d’autres préoccupations est bien réel—et alors nos dépotoirs continueront de grandir. 


Pierre-Olivier Pineau est titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie à HEC Montréal. Depuis plus de cinq ans, il est client de Compost Montréal, une compagnie qui s’acharne à composter là où la ville ne veut pas le faire.

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