Tuer son père
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Émilie Monnet, femme de théâtre anichinabée, poursuit sa quête identitaire avec un solo envoutant, engagé, et légèrement imparfait.
Le chant d’Émilie Monnet. Une voix harmonieuse, ferme, qui enveloppe la salle d’un sentiment sacré. Qui sort de sa bouche comme une «épée de lumière», tranchante et chaude. Quand on apprend qu’un cancer de la gorge a failli emporter cette magie, on la reçoit comme un cadeau précieux. Justement, c’est sur le chemin de cette maladie que nous amène d’Okinum, d’abord présentée au Théâtre d’Aujourd’hui en 2018, puis en anglais au Théâtre Centaur et au CNA, et actuellement à l’affiche au théâtre Espace Go jusqu’au 22 octobre. Mais ici, la douleur n’est pas une plaie: c’est un éveil pour tenter de comprendre sa parole presque engloutie par le silence, autant la sienne que celle des autres femmes anichinabées qui sont venues avant elle.
Entourée du public, Monnet est seule dans un décor dépouillé: une scène pentagonale au centre de l’espace, bordée de peaux de castor d’où la comédienne et autrice émerge comme d’un terrier. Les éclairages construisent le reste de la scénographie avec brio, et nous transportent tantôt dans l’espace, tantôt à l’hôpital, en forêt ou dans une tente. Au-dessus de nos têtes, des écrans dorés qui deviennent des extensions de son esprit, de ses rêves, de ses hallucinations, de ses savoirs. Seule autre présence humaine dans l’espace: Jackie Gallant, en retrait derrière son clavier, qui répond en sons et en musiques aux actions de l’actrice dans une symbiose qui rend l’environnement sonore presque tactile. Monnet porte une combinaison noire où sont brodés en cuivre des mots en anishinaabemowin (langue héritée de son arrière-arrière-grand-mère), mots qui se précipitent vers sa gorge pour sortir, mais qui bloquent en un amas ramifié qui rappelle le barrage du castor («okinum» en anishinaabemowin).
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