Apprendre à fendre du bois, au moins

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Billet

Apprendre à fendre du bois, au moins

Le travail manuel

Existe-t-il plus grande infortune que d’étudier sans travailler? Il faut apprendre à fendre du bois, au moins. La nécessité de travailler et d’interagir avec plusieurs hommes et choses est très rarement évoquée par l’intellectuel. Le travail manuel fréquent, qui d’ailleurs absorbe l’attention, est indéniablement la meilleure manière de le libérer des désagréments et de la sentimentalité qui influencent son style, tant à l’oral qu’à l’écrit. S’il travaille fort du matin au soir, bien qu’il puisse s’être plaint de n’avoir pu suivre le fil de sa pensée pendant ce temps, les quelques phrases précipitées qui à l’aube prennent note du vécu de sa journée seront plus mélodieuses et sincères que ces loisirs des plus libertins, mais inertes, qui auraient pu meubler son temps. L’écrivain devra certainement s’adresser à un monde de travailleurs, et c’est pourquoi cela doit devenir sa propre occupation. Celui qui a du bois à fendre et à corder avant la tombée d’un court jour d’hiver ne demeurera pas inerte devant ses tâches; mais chaque coup sciemment asséné retentira sobrement à travers le bois; et c’est ainsi que les coups de la plume de l’intellectuel, qui à l’aube font le récit du jour, résonnent sobrement mais plaisamment à l’oreille du lecteur, bien après que s’est éteint l’écho de la hache.


Ce texte de Henry David Thoreau a été publié dans A Week on the Concord and Merrimack Rivers (1849). Traduction : Maxime Fecteau

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