Chronique

Comment retarder l’apocalypse

Clément Sabourin
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Le journal de l’anthropocène

Comment retarder l’apocalypse

À l’heure où les glaciers se liquéfient et où la hausse de la température des mers asphyxie l’estuaire du Saint-Laurent, un ex-journaliste explique ce qui l’a poussé à changer sa vie de fond en comble.

Nous vivons dans une nouvelle ère aussi incertaine qu’effrayante: l’anthropocène, la sixième époque géologique en 4,5 milliards d’années après le bigbang. Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, le sort de la Terre est influencé par une seule et unique espèce: nous-mêmes. Plutôt qu’un succès de l’évolution, cette réalité marque une rupture—fatale?— dans l’ordre immuable des choses. Nous nous sommes aliéné la main qui nous nourrit.

Personnellement, ma «claque», je l’ai prise en 2015, par plus de 70 degrés Nord, dans le canal M'Clintok, au Nunavut. J’étais encore journaliste, à l’époque. Envoyé à bord du brise-glace scientifique Amundsen pour le compte de l’Agence France-Presse (AFP), j’ai été choqué de constater à quel point la surface de l’océan Arctique était libre de glace. Et malgré ça, deux pétroliers voguaient non loin de nous, indolents. La banquise n’existait plus, si bien que l’officier des glaces de la garde côtière canadienne, Roger Provost, peinait à retenir ses larmes face à cette étendue turquoise.

Trente-sept ans plus tôt, presque jour pour jour, le grand-frère de l’Amundsen, le Pierre Radisson, avait mis 12 heures pour faire demi-tour lors de son voyage inaugural, tellement la glace était épaisse. Elle empêchait toute progression. En cette fin septembre 2015, l’officier Provost avait la gorge nouée à mesure que son navire filait sans le moindre iceberg à l’horizon: «Ceux et celles qui veulent remettre en question le réchauffement climatique font l’autruche, ce sont des aveugles!» m’a lancé l’officier, conscient, à trois ans de la retraite, de vivre la fin d’une époque.

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