L’extérieur de nous-mêmes
Comment expliquer l’engouement pour l’ornithologie?
Qui nous protègera de la voracité des GAFAM?
Les algorithmes et le contournement du libre arbitre. Dune, les données personnelles ou le nouveau pétrole. La culture et la santé mentale. Une présence au monde en pointillé.
Il y a quatre ans, je faisais mon premier discours à l’Assemblée nationale en tant que députée. J’y parlais de solitude. De manque de temps pour être ensemble. De pression productiviste. De tristesse, face à ce que nos gouvernements nous proposent comme seul projet de société: avoir 100 dollars de plus dans nos poches.
Ça fait longtemps qu’on n’a pas eu de vision commune, qu’on n’a pas été porté·e·s par un désir collectif. Des petits bouts de petits projets ici et là, des luttes séparées, des listes d’épicerie électorales, des débats polarisés, du monde qui ne se reconnaissent plus entre eux et elles. Si s’aimer, ce n’est pas se regarder l’un·e l’autre, mais regarder ensemble dans la même direction, peut-être que le Québec ne s’aime plus. Peut-être qu’il est dans un rapport à lui-même proche de celui qu’on a quand on est en dépression: cynique et désintéressé.
On est dans quoi, collectivement, en ce moment? C’est quoi, le chapitre de notre histoire? On sait qu’il y a eu de grandes luttes sociales, qu’il y a eu des époques joyeuses et libératrices, puis il y a eu des gouvernements de droite, des coupes et des serrages de ceinture, et pendant que le 1% prenait de la bedaine et de l’assurance, l’anxiété montait partout ailleurs. Il y a eu les alarmes qui se sont mises à sonner: la crise du climat, celle du logement, le manque de sens, la santé mentale qui en arrache. Des industriel·le·s ont fait mentir des études pour pouvoir continuer à polluer. Des opinioneux·euses grassement payé·e·s nous ont dit, année après année, que les services publics, à la poubelle, les syndicats, à la poubelle, les artistes, à la poubelle, l’environnement, à la poubelle. Jusqu’à cette chose qui nous est arrivée récemment, et qui est en train de nous transformer profondément—à notre insu. Cette chose sur laquelle on a complètement perdu le contrôle, et qui est en train de foutre en l’air à peu près tout ce qui nous est cher comme humain·e·s. Je parle de ce que Shoshana Zuboff, sociologue et professeure émérite à la Harvard Business School, a appelé le capitalisme de surveillance. L’ouvrage L’âge du capitalisme de surveillance (2018), qui résulte de plus de dix ans de recherches, est aujourd’hui considéré comme une lecture incontournable à droite comme à gauche, et a été salué partout à travers le monde.
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