Les lectures d’Anne-Marie Cadieux

Caroline R. Paquette
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Les lectures

Les lectures d’Anne-Marie Cadieux

Chaque numéro, Nouveau Projet vous permet de plonger dans l’univers littéraire de gens qu’on aime. Cette fois, les lectures de la comédienne Anne-Marie Cadieux, qu’on retrouvera dans Molly Bloom à l’Espace go en mai prochain.

Celle qui a tenté de lire Proust à la plage n’est pas des personnes qui privilégient les lectures «légères» en vacances. Ni en général, pourrait-on ajouter à la lumière de cette foisonnante rencontre où Anne-Marie Cadieux est arrivée livres et notes en main. Questionnée sur son profil de lectrice, elle énumère quelques auteurs (Marie NDiaye, Philip Roth, Raymond Carver), s’arrête sur Peste et choléra de Patrick Deville, puis insiste pour mentionner l’une de ses récentes découvertes—le roman graphique Mon ami Bao, de Katty Maurey et Stéphane Lafleur, «qui a tous les talents».

Une lectrice exigeante, donc, fascinée par les profondeurs de la psyché humaine, mais surtout une lectrice libre, qui bouquine au gré de ses envies. «Je me plonge rarement dans l’œuvre complète d’un auteur, dit-elle. En revanche, j’ai lu Madame Bovary trois fois!» Elle revendique le droit de lire «en pièces détachées», comme ç’a été le cas avec Neige, d’Orhan Pamuk, «difficile mais passionnant».

La lecture lui permet à la fois de se projeter dans des univers fictifs —comme le théâtre, d’ailleurs—et de s’ancrer dans le réel: «Lire me donne le sentiment d’appartenir à l’humanité.» Elle nous présente ici cinq récits d’écrivains qui l’ont marquée.


Si c’est un homme

Primo Levi, 1947

«S’il y a un témoignage sur la Shoah à lire, c’est celui-là.» Récit de sa déportation à Auschwitz, Si c’est un homme évoque de façon magistrale la descente aux enfers de Primo Levi, en même temps qu’il le met au monde comme écrivain. «Ce chimiste de formation a une écriture extrêmement clinique. Il décrit l’âme humaine de façon dépassionnée, il décrit tout, c’est très prenant.»


Le Diable par la queue

Paul Auster, 1996

Elle est entrée dans l’univers de cet écrivain par la grande porte, en lisant sa fameuse Trilogie new-yorkaise. Puis, elle s’est laissé charmer par ce livre-ci, qui revisite les années de galère du jeune Auster à Paris. Le fait qu’il s’attarde à sa période sombre, aux écueils qu’il a rencontrés, aux humiliations mêmes qu’il a subies l’a interpelée: «On y parle du mépris qu’un artiste peut sentir de la part des autres quand il n’a pas encore réussi.»

Écrire

Marguerite Duras, 1993

Dans ce court témoignage publié à la fin de sa vie, Marguerite Duras explique qu’«écrire, c’est aussi ne pas parler, c’est se taire, c’est hurler sans bruit». «Presque le contraire de Primo Levi», remarque Anne-Marie, évoquant celui qui s’est servi de l’écriture pour extérioriser les mots enfouis. Fortement attachée à la «plume sublime» de Duras, une de ses auteures fétiches, elle conserve ses livres aux côtés de L’étranger de Camus, de La nausée de Sartre et... de vieux albums de Tintin qui sentent le moisi. «Les livres, tu penses que t’en donnes, mais ça pousse partout!»

  • Photo: Cindy Boyce

Darkness Visible. A Memoir of Madness

William Styron, 1990

Elle a d’abord lu Le choix de Sophie lors d’un voyage à Rome—«Je ne visitais plus la ville, j’étais happée!»—, puis s’est laissé prendre par ce livre très intime, le dernier publié par William Styron. «Une autre descente aux enfers. C’est le récit d’une dépression, le plus juste, à mon sens, sur cette maladie.»


Just Kids

Patti Smith, 2010

Retraçant les premières années de Patti Smith avec le photographe Robert Mapplethorpe, Just Kids dévoile également le New York des années 1960 et 70. «C’est un livre rafraichissant, rempli d’humilité et d’amour, sur leurs débuts comme artistes.» Smith a écrit Just Kids à partir de ses journaux intimes, «mais ce n’est pas un livre people, précise Anne-Marie. Ça demeure le livre d’une véritable écrivaine». 


Caroline R. Paquette est la coordonnatrice éditoriale de Nouveau Projet depuis qu’elle a terminé sa maitrise en littérature, en 2011.

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