Rétablir sa foi en l’humanité

Laurence Gough
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Commentaire

Rétablir sa foi en l’humanité

L’ironie a longtemps été l’accessoire culturel à la mode. Mais alors que la gloire du second degré pâlit, un discours axé sur la transparence gagne en popularité sur l’internet. Ces blogueurs ont survécu à l’anxiété, à la dépression, à l’obésité. Et ils racontent tout.

Considéré dans ce texte

Les blogues. Le premier et le second degré. Les hipsters. L’extimité. La transparence. La détox. L’art de mimer le réel dans la prose. Les racks à pastilles.

En novembre 2012, le New York Times met en ligne un billet d’opinion de Christy Wampole intitulé « How to Live Without Irony ». En l’espace de trois jours, 740 lecteurs se ruent dans la section « Commentaires » pour soutenir ou invalider les propos de la collaboratrice. Le billet reste au sommet de mon fil d’actualité Facebook pendant des jours; tout le monde le partage. Grosso modo, Wampole — qui est professeure adjointe au Département de français et d’italien de l’Université de Princeton — reproche aux milléniaux (et plus particulièrement aux hipsters) d’avoir fait de l’ironie un mode de vie. L’ironie permet à qui en use d’esquiver la responsabilité de ses choix, soutientelle. Émettre un discours en le tournant d’emblée en ridicule reviendrait à adopter une attitude défensive, puisqu’il est difficile de déconstruire un second degré qui ne cherche pas à être signifiant. Mener une existence ironique serait donc une façon de se dissimuler en public. L’art de la conversation, du contact humain, de la présence à soi et aux autres, croit-elle, s’est effacé derrière un narcissisme clinquant et défaitiste. Un mois plus tard parait sur Littéraires après tout (un blogue collectif québécois qui se consacre à la littérature et à la critique) le billet « Kill It With Fire », d’Alexie Morin [« Je me trouve à la limite de la magie », NP04]. L’auteure montréalaise y exprime sa détresse quant à l’étourdissante quantité d’absurdités et de savoirs véhiculés sur l’internet. Saturé d’articles de journaux et d’études féministes, de photos de chats et de florilèges de téléréalité, son esprit perd la faculté d’articuler des pensées cohérentes. Quand tout argumentaire peut être déconstruit et que toutes les croyances ont été ébranlées, quand les discours friables et le contenu WTF prévalent, et que le temps passé sur l’internet aurait été plus doux auprès des gens aimés, le sens se perd. Le mois suivant, l’auteur Stéphane Larue publie sur Terreur ! Terreur ! (une « centrale d’écrivains » québécoise) un billet qui fait écho aux propos de Wampole et de Morin. Dans « In the Age of Social Media, Cleverness Is the New Gold Rush », Larue fait part de son ras-le-bol à l’égard de l’ironie, qu’il taxe d’artifice rhétorique servant à divertir la galerie virtuelle de Facebook. Il la dépeint comme un véhicule de vantardise, une manifestation de couardise, un bouclier derrière lequel parer d’éventuelles attaques. Du discours des trois auteurs émane un souhait commun : celui de voir affluer davantage de sincérité dans les rapports humains, y compris sur l’internet. Ils réclament du premier degré. Du vrai. La vacuité belliqueuse a fait son temps, plaident-ils. L’heure est venue de se commettre. À peu près à la même époque, comme pour mettre un baume sur la contrariété des détracteurs de l’ironie, des sites comme BuzzFeed et Distractify adoptent le leitmotiv « To restore your faith in humanity » (« pour rétablir votre foi en l’humanité »). Au fil de publications flamboyantes de premier degré, on se met à dresser la liste des 10 (des 30, des 50 !) photos qui sauront enfin prouver que l’humain est bon. Des clichés d’automobilistes arrêtant la circulation pour aider des personnes âgées à traverser la rue, des couples homosexuels fraichement mariés s’embrassant sur le parvis d’une église, des marathoniens aidant leurs compétiteurs blessés à franchir la ligne d’arrivée, des quidams sauvant des brebis de la noyade, des riches donnant aux pauvres — vous vouliez de l’humain ?

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Extimité

À l’ère où la publicité et les magazines cherchent à inciter les consommateurs à adopter des produits et des habitudes de vie qui promettent de « détoxifier » l’organisme, il semble que le projet de purgation se soit étendu jusqu’à notre identité même.

Ces dernières années, quantité de personnalités du web québécois ont pris l’initiative de livrer le témoignage d’un épisode douloureux de leur vie ou d’un combat qu’elles poursuivent. Par exemple, dans un billet sur Urbania titré « Tomber dans le rack à pastilles », l’auteur, réalisateur, humoriste et comédien Jonathan Roberge fait le récit de sa première crise de panique et de la dépression qui a suivi. Marilou, auteure-compositrice-interprète et fondatrice de Trois fois par jour, un populaire blogue de cuisine, a publié sur celui-ci un texte intitulé « Les troubles du comportement alimentaire : mes perceptions, mon histoire ». Elle y raconte ce qui a engendré lesdits troubles, dont la guérison a inspiré la marque de commerce de son entreprise. Le peintre et vlogueur Mathieu St-Onge révèle, dans une vidéo de 30 minutes sur Trouble.voir.ca, avoir entretenu une dépendance à la pornographie. Valérie Fraser, inconnue jusque-là, a créé la page Facebook « Le jour où j’ai arrêté d’être grosse », où elle partage avec ses abonnés ses accomplissements et les difficultés inhérentes à son combat contre l’obésité.

Ces blogueurs ont un souhait commun : celui de voir affluer davantage de sincérité dans les rapports humains, y compris sur l’internet. Ils réclament du premier degré.

Ces récits ont une vocation commune : fournir des repères à qui traverserait les mêmes épreuves. On peut aussi y déceler le souci qu’ont les blogueurs de se dépeindre comme courageux, modestes et authentiques. Il y a dans cette entreprise de dévoilement le reflet d’un esprit propre aux milléniaux, soit la tranche de la population née entre les années 1980 et le début des années 2000 (autrement dit, la génération qui a grandi avec et en même temps que l’internet). En parallèle de la tendance à la raillerie adolescente pointée du doigt par Wampole et Larue, les milléniaux se caractérisent par leur désir de transparence politique, économique, morale et symbolique, relève le mythologue et spécialiste des marques Georges Lewi, dans son essai Les nouveaux Bovary : Génération Facebook, l’illusion de vivre autrement ?. Si l’on considère qu’une large part des membres de cette génération arrivent à une étape de leur vie où ils sont prêts à se stabiliser, à s’accomplir professionnellement et à fonder une famille, il n’est pas étonnant qu’ils en soient également à construire un projet réflexif sur eux-mêmes et à dresser des bilans de leurs difficultés passées. « Voici ce qui m’a causé du tort. Voici comment je m’en suis sorti. » Et puisqu’à l’exigence de transparence s’associent des besoins de visibilité et de reconnaissance, on comprend pourquoi certains blogueurs font le choix de livrer un pan de ces bilans à leur lectorat. Serge Tisseron, psychiatre, psychanalyste et docteur en psychologie, fournit dans son essai L’intimité surexposée une définition éclairante des mécanismes qui sont ici à l’œuvre :

Le désir d’extimité est le mouvement qui pousse chacun de nous à mettre en avant une partie de sa vie intime, de son monde intérieur, afin d’en avoir un retour, une validation de sa façon de vivre, de penser, à travers les réactions des autres. Grâce à elles, je vais m’approprier mon identité, mieux me connaitre et, finalement, enrichir ma personnalité. On saisit par là que désir d’extimité et besoin d’intimité ne s’opposent pas : les deux sont complémentaires.

S’il peut paraitre risqué pour les blogueurs d’exposer leur intimité, il faut savoir qu’il leur revient de déterminer les paramètres de leurs révélations. Valérie Fraser, par exemple, déroge rarement sur sa page Facebook du mandat qu’elle s’était fixé au départ : discuter des progrès de son conditionnement physique, de ses joies et de ses découvertes alimentaires, des épreuves auxquelles elle fait face dans son combat contre l’obésité. En règle générale, la porte est close sur le reste. Si un commentateur se montre indiscret, elle le ramène à l’ordre. Ces paramètres sont si bien établis que le jour de l’annonce de sa grossesse (annonce servant à expliquer son changement de physionomie), les quelques abonnés qui ont cherché à connaitre l’identité du père de l’enfant se sont fait mettre en boite par les autres. On peut s’ouvrir, mais pas se laisser béant. À travers le phénomène de sa médiatisation, l’intimité exhibée ne se dilue pas dans l’espace public, mais se redéfinit.

  • Illustration: Marianne Chevalier

Dispositifs

La transmission du témoignage implique naturellement une part de performance. Il s’agit de produire un récit sur soi et de mettre en place une mécanique narrative qui saura disposer le destinataire à le recevoir. Autrement dit, pour livrer de l’intime, il faut générer de l’intimité. Mathieu St-Onge l’a compris. La mise en scène de son témoignage vidéo sur la dépendance à la pornographie est consciencieusement orchestrée. D’abord, il y a le format : mobiliser l’attention d’un internaute pendant 30 minutes (une rareté dans l’univers du vlog), c’est générer les conditions temporelles propices à l’élaboration d’un lien de confiance et d’écoute. Ensuite, il y a l’environnement, qui est le sien. Il accueille le spectateur dans son atelier, à la lueur d’une chandelle, auprès de ses tableaux. Calé dans une chaise face à l’écran de son ordinateur, il donne l’illusion d’un tête-à-tête au spectateur installé dans la même posture. « Ça me fait plaisir d’être avec vous pis d’en parler, dit-il. D’avoir ce lien d’intimité-là. » En évoquant l’intimité, il l’aide à prendre forme.

Une familiarité se crée autour du partage en ligne de l’intimité, et avec elle, une impression de communauté. L’internet est grand, mais ici nous sommes entre nous.

« En publicité, en politique, en mode, à la télévision — bref, dans presque toutes les représentations de la réalité contemporaine — , on se prévaut de l’ironie. Prenez, par exemple, une publicité qui se définit explicitement comme telle, qui ridiculise son propre format et qui encourage son public cible à rire d’elle, avec elle. Elle reconnait à l’avance son inaptitude à accomplir quoi que ce soit de significatif. Nulle attaque ne peut être dirigée contre elle, puisque la publicité s’est déjà vaincue elle-même. Le cadre ironique fait l’effet d’un bouclier contre la critique. Sensationnellement indirect, il est une forme de subterfuge : au sens étymologique, une « fuite par-dessous » (subter + fugere). La franchise nous est devenue insupportable. Comment en sommes-nous arrivés là ? En cultivant l’idée, notamment, que cette génération a peu à offrir au plan culturel, que tout a déjà été fait, ou que toute conviction profonde fera bientôt place à la conviction opposée, ce qui rendra la première risible, ou pire, méprisable. Cette attitude défensive fonctionne à la manière d’une capitulation préventive. Elle relève de la réaction et non pas de l’action. »

Extrait de « How to Live Without Irony », par Christy Wampole (New York Times, novembre 2012)

Une fois la connivence proposée, les blogueurs peuvent s’attendre à un retour du balancier. Par exemple, en réponse à ses épanchements teintés d’humour, plusieurs abonnées de Valérie Fraser lui donnent du « ma belle », comme à une protégée. Une familiarité se crée autour du partage en ligne de l’intimité, et avec elle, une impression de communauté. L’internet est grand, mais ici nous sommes entre nous. Pour amener un public à s’identifier au narrateur d’une histoire et, par la bande, gagner sa sympathie, l’apport de détails visuels et référentiels est d’un grand secours. « Les descriptions sont ce qui font du lecteur un participant sensoriel à l’histoire », soutient l’écrivain américain à succès Stephen King. Si ce principe s’applique au roman, il se prête aussi bien au large éventail des médiums narratifs, du récit biographique en ligne jusqu’au stand-up comic — et, pourquoi pas, à une forme hybride des deux. L’humoriste Jonathan Roberge fait bon usage de ce procédé lorsqu’il relate sa toute première crise de panique, qui s’est déroulée dans un dépanneur : « Je me suis laissé choir comme une grosse sirène non élégante dans le rack à pastilles et j’ai dit au monsieur : “Appelle une ambulance, dude ! Je pense que je fais une crise cardiaque !” J’étais persuadé à ce moment-là que j’avais peut-être une malformation cardiaque et que c’était là que je crevais, entre un paquet de Fisherman’s Friend et des Halls Centres. » En citant des marques de pastilles assez populaires pour être connues de ses lecteurs, Roberge met en évidence leurs références communes. Le processus d’identification du destinataire à l’histoire est ainsi facilité. En canalisant dans l’image de la sirène échouée la représentation physique de son abattement, il se sert d’un procédé humoristique qui désamorce en partie la charge dramatique de l’évènement. La mise à distance ainsi opérée rend le sujet plus approchable et plus digeste. Bien que comique, la comparaison avec la sirène aide aussi à faire voir une réalité qu’il serait moins aisé de définir autrement qu’à l’aide du langage figuré.

La scène telle que l’auteur l’a vécue se profile donc. Roberge fait en sorte d’actualiser la vérité de l’expérience — et voilà bien l’effet recherché : faire vrai. User de procédés narratifs qui serviront à mimer le réel dans la prose, de façon à réaffirmer le contrat d’authenticité dont le témoignage se porte garant. Mathieu St-Onge, pour sa part, rigole en évoquant les images qui ont bercé ses premiers émois sexuels : les films érotiques présentés à l’émission Bleu nuit sur les ondes de TQS, la pochette de l’album J’me sens ben de Diane Dufresne, où la chanteuse exhibe fièrement ses seins nus peinturlurés de fleurs de lys... En déclinant ces références, il s’arroge la complicité des membres de sa génération qui éprouveraient pour elles la même nostalgie. « Une description commence dans l’imagination de l’écrivain et doit s’achever dans celle du lecteur », affirme encore Stephen King. Le spectateur complète la scène évoquée en y accolant ses propres souvenirs, et il s’égaie. Bien que le discours du témoignage soit intrinsèquement lié au désir de transparence, il comporte en essence, nous l’avons vu, une dimension spectaculaire. Pour faire se révéler la vérité de l’expérience, il faut la mettre en forme. Il s’agit de reproduire, à l’aide d’artifices textuels, une situation vécue; imiter le réel pour essayer de le donner à lire, puisqu’il échappe à la représentation. La sincérité, donnée prégnante du témoignage, se soumet au même paradoxe. À l’opposé de la fluidité qu’on voudrait lui prêter, le flux entre l’état ressenti et sa manifestation extérieure est interrompu. Avant de jaillir au-dehors, la parole qu’on veut sincère demande à être formulée. L’étape de l’expression de la sincérité comporte ainsi sa part d’écueils en ceci qu’elle relève de la performance, et que l’idée même de performance entre en rupture avec elle. Le témoignage s’appuie donc sur des concepts — le réel et le sincère — qui glissent des mains de qui cherche à les saisir. Faute de mieux, il en fournit alors des imitations.

Le cas de Belle Gibson

Le témoignage en ligne a ses revers. En mars 2015, la mythomanie d’une blogueuse australienne a été révélée au grand jour, matérialisant du coup un risque latent du capital de sympathie. Belle Gibson, dont le blogue The Whole Pantry remportait jusqu’alors un vif succès, a été accusée d’avoir bâti un empire financier sur des bases frauduleuses. Gibson prétendait, depuis 2009, traiter un cancer du cerveau en phase terminale à l’aide de méthodes alternatives. Ces méthodes, dont elle livrait notamment les secrets par le biais d’une application sur iPhone comptant 200 000 abonnés, se fondaient largement sur une alimentation saine. Le problème, c’est que ce cancer était forgé de toutes pièces et que le mensonge incitait les véritables cancéreux à emprunter des comportements dangereux. La supercherie a fait les manchettes quand les autorités australiennes ont découvert que les 300 000 $ amassés par Gibson à l’intention d’œuvres caritatives ne leur avaient jamais été versés.

Récits édifiants

Si le ton privilégié du témoignage en ligne est celui de la connivence entre semblables, la communauté d’internautes se rassemble néanmoins sous l’égide d’une figure reine, celle du blogueur. « Créer un fan-club autour de soi, voilà l’affaire. La popularité se gagne à travers la mise en ligne de son roman personnel », analyse Monique Dagnaud, sociologue et spécialiste des médias, de l’internet et de la culture des jeunes. En mettant en scène leur souffrance, les heures les plus sombres de leur combat puis leur victoire durement acquise, les blogueurs se dépeignent comme héros de leur drame intime et offrent aux lecteurs un modèle accessible auquel se référer en cas de difficultés analogues. Traduite en anglais, l’expression récits édifiants devient cautionary tales — des contes préventifs. « Fais attention, mon chum, tu voudrais pas vivre ce que j’ai vécu. » À une époque où prolifèrent les émissions de téléréalité, où le réel est glorifié, où la transparence fait figure de proue au plan des valeurs sociales, on ne s’étonne pas que le blogueur ait remplacé le Petit Chaperon rouge à la barre du conte moralisant. Dans son vlog, Mathieu St-Onge dit vouloir contribuer à ce que davantage d’échanges virtuels se déroulent sous le signe de l’humilité. Il y a, dans cet appel, un souhait de dépouillement semblable à celui qu’émet Alexie Morin lorsqu’elle fait état de la surstimulation dont le web l’accable. Le dépouillement, Marilou en a fait son emblème. L’esthétique des photographies et des vidéos publiées sur Trois fois par jour et sur ses plateformes de médias sociaux connexes en est une de blancheur et de pureté. Des fleurs coupées, des couvertures de laine, du bois brut. La maison cocon. On y décèle l’apologie du « retour à l’essentiel » et une invitation à se « détoxifier l’organisme ». Voilà à quoi ressemble la quiétude une fois évacués les comportements toxiques, une fois traversée la forêt d’épines. Prendre Marilou comme modèle, c’est aspirer à une version assainie de soi. Si, malgré les efforts, notre pureté se dérobe, on peut se consoler en mimant celle de Marilou. Il n’y a qu’à se rendre dans la section « Boutique » de Trois fois par jour, où il est possible de se procurer toute une panoplie d’accessoires permettant de reproduire son mode de vie. Acheter ses produits dérivés, c’est acheter un peu de son modèle. Le dépouillement, ici, s’acquiert à travers la consommation. On peut éprouver un malaise à ce que la victoire d’un combat personnel serve de prétexte à une campagne de marketing. Cependant, force est d’admettre que le témoignage en ligne recèle un pouvoir de sensibilisation immense. Au fil des récits édifiants, les blogueurs fournissent une liste de symptômes qui pourrait aider les lecteurs à déceler en eux ou chez leurs proches le problème décrit, puis une liste de gestes qu’ils peuvent poser pour le surmonter. En prime, il est fréquent de retrouver les coordonnées de professionnels compétents en conclusion des billets. Et dans la section « Commentaires », les lecteurs discutent. Ils échangent des conseils et des encouragements. Ils s’épanchent sur leurs propres drames. On leur répond de tenir bon. Une véritable dynamique d’entraide est mise à l’œuvre. N’en déplaise aux détracteurs de l’ironie, donner dans le premier degré et la sincérité ne garantit pas d’échapper au spectacle ou au narcissisme. Parler de soi, c’est tirer sur des ficelles narratives. Se dévoiler, c’est se mettre en scène. Néanmoins, si, en livrant leur témoignage, les personnalités du web entament la discussion sur des enjeux de société, ou permettent à des étrangers de s’épauler, ou posent le premier jalon vers une guérison, il y a peut-être là, oui, matière à panser une foi blessée en l’humanité.


Laurence Gough est auteure de fiction et assistante éditoriale aux éditions Marchand de feuilles. Elle détient une maitrise en études littéraires, profil création de l'UQAM, qui traite notamment des discours de la sincérité.

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