Un procureur pour les animaux
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La carte du Québec est colorée du bleu de nos lacs, de nos rivières et du fleuve Saint-Laurent. Nous habitons un pays d’eau douce. À quelques exceptions près, cette richesse est publique. Or, aucune législation n’existe pour garantir l’accès des citoyens aux rives de leurs cours d’eau. Aux États-Unis, une loi protège le droit de se baigner, de naviguer et de profiter des plans d’eau. Une initiative dont nous pourrions nous inspirer...
Au printemps dernier, j’ai participé à une expédition en kayak autour de Montréal pour le compte de Radio-Canada. J’ai été frappé par le nombre peu élevé de Montréalais qui profitaient du fleuve Saint-Laurent ou de la rivière des Prairies. Malgré le temps splendide, notre convoi de kayakistes était le plus souvent seul sur la route bleue.
Est-ce si étonnant? «Au Québec et au Canada, le grand paradoxe est que l’eau est publique, mais que les berges ne le sont pas», dénonce Jean Lacoursière, de la Société des Gens de baignade.
Aux États-Unis, le gouvernement fédéral donne à la population et aux États des outils légaux pour se réapproprier les rives, dont l’accès est protégé par le Coastal Management Act of 1972, qui tient compte des intérêts de l’industrie, de l’environnement, de l’accès public, des loisirs et du tourisme. En vertu de cette loi, les États ont l’obligation de préserver l’accès gratuit au littoral pour tous les citoyens. Le gouvernement fédéral octroie aux États un budget établi selon la longueur des côtes, la population et le plan de développement des rives. Des allocations sont aussi offertes à ceux dont le plan d’aménagement des côtes est jugé exemplaire.
En Californie, le California Coastal Act a pour but, notamment, de «maximiser les accès publics et le potentiel récréatif des berges». Il stipule que «le développement ne devrait pas nuire au droit du public à l’accès à la mer».
Aux États-Unis, les côtes ont un énorme potentiel économique. Le tourisme est le secteur où se créent le plus d’emplois et se génèrent le plus de revenus étrangers. Selon le Catanese Centre for Urban and Environmental Solutions de la Florida Atlantic University, les États côtiers reçoivent environ 85% des revenus du tourisme. En 1994, le U.S. Army Corps of Engineers a estimé que les visiteurs des rives dépensent en moyenne 64$ pour chaque dollar dépensé pour la gestion des sites.
Le cadre québécois
Au Québec, aucun cadre légal ou institutionnel ne garantit à la population l’accès aux plans d’eaux. L’article 920 du Code civil québécois stipule que «[t]oute personne peut circuler sur les cours d’eau et les lacs, à la condition de pouvoir y accéder légalement, de ne pas porter atteinte aux droits des propriétaires riverains, de ne pas prendre pied sur les berges». En d’autres termes, comme le dénonce la Société des Gens de baignade, la province ne «dispose d’aucune législation expresse quant à l’accès public aux rives. Ici, contrairement à ce qui prévaut dans la plupart des pays occidentaux, le droit d’accès est un attribut de la propriété».
Montréal semble dépossédée de son littoral. L’autoroute Bonaventure, le port, la voie maritime, notamment, coupent la population des rives. «Dans les années 1950 et 1960, on a mis nos infrastructures le long des rives, remarque l’urbaniste et chef de Projet Montréal Richard Bergeron. La réappropriation des rives est la dernière mode en urbanisme, partout sur la planète. De nombreuses villes du monde qui s’étaient coupées des plans d’eau renouent avec les rives.»
Dans le cadre du 400e anniversaire de la ville de Québec, le gouvernement provincial a développé la promenade Samuel-De Champlain. Sur 2,5 km, à quelques mètres du fleuve, on marche, on roule à vélo, mais on ne se trempe pas encore le gros orteil dans l’eau.
Une loi encourageant l’accès aux rives québécoises contribuerait à encourager une plus grande utilisation des plans d’eau par la population, avec entre autres bénéfices une meilleure qualité de vie dans nos villes et villages et des retombées économiques locales. Cette loi pourrait participer à l’émergence d’une culture riveraine. La réappropriation du littoral, c’est une affaire citoyenne.
Journaliste multimédia indépendant, Simon Coutu travaille à Montréal et à l’étranger. Il est également documentariste.
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