Qualité de vie®

Alain Deneault
Illustration: Thaïla Khampo
Publié le :
Essai

Qualité de vie®

«Le produit intérieur brut mesure tout, sauf ce qui fait que la vie vaut la peine d’être vécue», disait Robert Kennedy, quelques semaines avant sa mort en 1968. Apparu la décennie suivante, le concept de qualité de vie devait offrir une alternative au discours économique. Est-ce vraiment le cas?

Considéré dans ce texte

La soif de chiffres de la science économique. Topito et les images d’Épinal. Deloitte, Rockefeller et Yvon Deschamps. La gouvernance et l’infantilisme. Le caractère fictionnel des données. Le bonheur de consommer.

Quand, de gauche à droite, un écologiste en vogue comme Aymeric Caron, un néolibéral repenti en Joseph Stiglitz ou encore un militant conservateur tel Henri Guaino se présentent comme de fervents adversaires du produit intérieur brut (PIB), on comprend que cet indicateur a clairement cessé de faire l’unanimité. Le PIB apparait aujourd’hui comme un instrument dépassé, incapable de mesurer la richesse réelle des collectivités ni de considérer les états de conscience favorisant le bonheur et l’espoir.

Depuis le 18e siècle, François Quesnay, Adam Smith, Thomas Robert Malthus, Friedrich Hayek, Milton Friedman et combien d’autres à leur suite ont relégué hors champ les vocations dites «non productives» [voir encadré page suivante]. N’était digne de passer pour objet économique que ce qui se laissait compter. Ainsi la nouvelle «science économique» a-t-elle assis son autorité jusqu’à nous.

Cela a duré d’autant plus qu’on a affiné les méthodes pour faire valoir ce principe intéressé. Ce sont encore aujourd’hui les cours boursiers, les statistiques sur le chômage ou les taux d’intérêt qui, en plus de ce PIB, servent d’indicateurs pour traduire ce qu’il en est des prétendus moral des ménages, humeur du marché et santé économique des peuples.

Cela a trop duré. Ont été établis de nouveaux indices qui prétendaient redonner leurs droits à des réalités ayant une pertinence certaine pour nous, bien qu’elles échappent aux normes comptables. C’est ainsi que des expressions telles que «qualité de vie» sont apparues dans le décor intellectuel du dernier tiers du 20e siècle.

La belle affaire.

Les classements de références qui accordent une place à la question de la qualité de vie se sont accumulés. Ils se baptisent The World Health Organization Quality of Life, Indice de développement humain, Better Life Index ou Social Progress Index et portent la signature respective de l’Organisation mondiale de la santé ou du Programme des Nations unies pour le développement—rattachés tous deux à l’ONU—, de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ou de l’ONG libérale Social Progress Imperative.

La méthode type de ces indices consiste à agréger à des considérations économétriques implicites ou explicites (l’importance des revenus, le pouvoir d’achat, l’inflation) un certain nombre de critères réputés intangibles (droit de vote, droits de la personne, santé, aménagement du territoire), et ce, pour quadriller ce qu’il en est d’un cadre général de vie eu égard à des considérations sensibles, psychologiques, civiques et éthiques. En ce qui concerne par exemple le Social Progress Index, l’entreprise intellectuelle consiste à subdiviser les thèmes en trois grandes catégories: les besoins fondamentaux, les assises du bienêtre et l’égalité des chances. D’abord, est-on en situation de se nourrir, de se soigner, de se loger, et ce, en toute sécurité? Ensuite, peut-on se doter de savoirs rudimentaires, s’informer sur les enjeux publics, vivre dans des lieux sains et se sentir globalement bien? Enfin, croit-on que le cadre dans lequel on se trouve suscite, juridiquement et sociologiquement, des manifestations de liberté, un sentiment d’inclusion et des gages d’ouverture, et qu’il permet de mener des études poussées? Un faisceau d’indicateurs et de données traité de manière similaire dans chaque pays mène à l’établissement d’un classement.

Au mieux, les institutions publiques qui produisent ces classements se restreignent aux faibles marges de manœuvre que les États membres, acquis aux intérêts du grand capital, leur concèdent. Au pire, ce sont des organisations indépendantes qui font de l’établissement de ces palmarès leurs choux gras. Pour elles, le PIB se veut moins le symptôme d’une compréhension étriquée du monde qu’un ensemble de données simplement incomplètes. Le slogan de l’ONG qui produit le Social Progress Index se lit donc ainsi: «Our vision is a world in which social progress sits alongside economic prosperity as a measure of development» («Notre vision est celle d’un monde où le progrès social accompagne la prospérité économique comme mesure du développement»).


Ces classements bercent les citoyens dans l’illusion qu’ils sont bien mieux là où ils se trouvent qu’ailleurs, malgré des décennies de compressions budgétaires.

On nous enferme encore et toujours dans l’approche réformiste d’une social-démocratie épuisée, qui s’est affairée au fil du 20e siècle à contenir le capital pour, finalement, mieux l’accompagner et le faire se perpétuer. Il s’agit sinon, pis, d’une stratégie de «gouvernance» par laquelle subordonner la vie et ses qualités à un art libéral de la gestion inspiré du domaine privé, en vertu duquel tout se réduit à des données proprement administrables par des «parties prenantes». 

La qualité de vie se voit désormais pondérée, jaugée, brevetée et commercialisée. Elle se présente telle une marchandise comme une autre auprès d’une importante clientèle institutionnelle. L’ONG Social Progress Imperative vend aux pouvoirs publics et privés d’Occident des informations empiriques vantant le cadre idéal dans lequel ils développent leurs activités prospères. Elle se garde bien d’évoquer leurs responsabilités abyssales en ce qui concerne la pollution, la déstructuration, la corruption et les guerres qui mettent sens dessus dessous les pays du Sud et de l’Est, figurant fatalement aux bas des tableaux. Le client a toujours raison.

L’ONG permet ainsi au capitalisme de continuer sur sa lancée chiffrée, en intégrant des critères nouveaux à ses diagrammes, graphiques et totaux, de façon à le prémunir de toute critique. Car quel signal envoient ces classements aux citoyens? Ils les bercent de l’illusion qu’ils sont bien mieux là où ils se trouvent qu’ailleurs, malgré des décennies de compressions budgétaires dans les programmes sociaux, de stagnation des revenus et la réduction spectaculaire des processus électoraux à de véritables cirques.

Les éponges à idéologie gobent le message, succombant à la manœuvre. En témoigne «thomasg», rédacteur régulier du site fourretout Topito.com qui commente le palmarès du Social Progress Index 2017 tel que le souhaite l’ONG: «Ça a l’air cool le Danemark», «En Suède, ils ont des séries cools» ou «Je vais déménager en Nouvelle-Zélande. Mais avec une petite laine, quand même», écrit-il en agrémentant ses descriptions d’images d’Épinal—un fiord au coucher de soleil ici, de petites maisons  colorées là. L’exemple de «thomasg» est moins superficiel qu’il en a l’air. En présentant les pays comme des marchandises sur un étalage, il suit le mouvement rhétorique des producteurs d’indices.

Les derniers sceptiques quant au caractère compatible de la notion officielle de «qualité de vie» à l’idéologie libérale pourront considérer la teneur symbolique du frontispice de l’ouvrage méthodologique du Social Progress Index: y figure une femme hindoue portant sous le bras un bouquet de coriandre tandis qu’elle entretient gaiement une conversation grâce à son téléphone portable (de marque Life’s Good?). Au premier coup d’œil, on croirait y reconnaitre l’écologiste Vandana Shiva soudainement convertie à l’économie de marché. Du marketing on ne peut plus occidental. Foin de toutes les considérations sur le consumérisme irresponsable entretenu par notre mode de vie, sur l’obsolescence programmée voulue par l’industrie des télécommunications, sur l’extractivisme exalté des entreprises minières et sur le travail des enfants qui lui est attribué. La qualité de vie regarde le bonheur de consommer.


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Un déni méthodique

Cette Qualité de vieMD ne comporte donc rien de subversif. L’identité des personnes nommées au sein du conseil d’administration et du comité consultatif de Social Progress Imperative parle d’elle-même: des membres de la fondation Rockefeller, des professeurs d’écoles de commerce, des gestionnaires professionnels de fonds privés et autres spécialistes de l’entrepreneuriat social. Parmi les principaux commanditaires de la prétendue entreprise de déconstruction du PIB et autres paramètres traditionnels de l’économétrie se trouve… Deloitte, la plus grande firme comptable de vérification et de conseil au monde!

Si les résultats des complexes calculs en jeu offrent un portrait des situations nationales plus circonstancié et détaillé que ce que permet l’intuition, on ne s’éloigne jamais toute-fois de la fameuse lapalissade d’Yvon Deschamps: «Vaut mieux être riche et en santé que pauvre et malade.» Ces indices nous apprennent tout au plus qu’on vit mieux en pays riche qu’en pays pauvre, là où le territoire est aménagé que là où ce n’est guère le cas, dans un État où prévalent des services sociaux que là où la population en est privée… Hormis quelques paradoxes qui ne font tomber personne de sa chaise—l’Arabie saoudite, les États-Unis ou la Chine sont des pays où la concentration d’actifs ne coïncide pas tout à fait avec le bienêtre de l’ensemble de la population—le classement auquel on a droit recoupe sensiblement celui des indicateurs traditionnels dont Social Progress Imperative prétend pourtant explicitement se distinguer. Cela confirme qu’aucun indice ne peut se substituer à une analyse critique, vraiment qualitative celle-ci, quoique moins instrumentale.

À quoi d’autre pourrait de toute façon servir un indicateur ou un indice?

Le discours libéral sur cette Qualité de vieMD se laisse essentiellement conjuguer à la forme passive. Il se caractérise précisément par l’absence hautement problématique de sujets politiques, de citoyens et d’acteurs publics. Les pouvoirs institués se montrent incapables de penser les marges impondérables qui permettent l’agir politique, le militantisme, l’initiative civique et les insurrections, ceux-là mêmes qui ont rendu possibles les avancées sociales qu’on se contente de présenter froidement comme des acquis ou de simples variables dans ces rapports.

Aucune réflexion critique ne cherche à expliquer pourquoi, d’un point de vue politique, industriel et financier, certains pays obtiennent des résultats médiocres, voire mauvais, et d’autres, non. Aucun raisonnement logique ne vient faire de lien sur les vases communicants expliquant que les uns, pays qualifiés, pillent et dominent abusivement les autres. Enfin, on n’attribue à aucun mouvement syndical, à aucune mouvance politique, à aucune grève, à aucune série de contestations ni à quelque soulèvement que ce soit les institutions démocratiques, avantages sociaux et services publics chèrement acquis qui participent pourtant officiellement à la définition de cette qualité de vie. Conséquemment, rien n’est fait pour penser l’organisation politique des dominés, et encore moins pour évoquer les bienfaits d’une sainte colère et le génie de la dissidence ayant permis d’y arriver. Agir et compter politiquement ne fait étrangement pas partie de la Qualité de vieMD.


La notion de «qualité de vie» a continué à être décrite à la manière fétichiste de toute marchandise: elle est un produit prêt à habiter, çà et là dans différents endroits privilégiés du monde.


Une infantilisation

Bien entendu, aucun signataire de rapports empiriques sur cet enjeu ne l’exprimera comme tel. Dans l’optique tout aussi positive (psychologiquement) que positiviste (épistémologiquement), on prétendra vouloir outiller les acteurs de la société civile afin qu’ils sachent améliorer le sort des populations concernées. Mais on débite le tout dans une langue gestionnaire et managériale qui ne parvient nullement à dissimuler son ineptie: «L’Index vise à être un outil pratique qui aide les dirigeants et les praticiens du gouvernement, des entreprises et de la société civile à mettre en œuvre des politiques et des programmes qui accélèreront le progrès social», se complait à écrire le Social Progress Imperative. C’est évidemment donner là dans un infantilisme de type boyscout dont la rhétorique sur la gouvernance a le secret. On feint d’ignorer que c’est en connaissance de cause que les oligarques à la tête de régimes inégalitaires privent des populations entières de deniers publics et donc d’institutions et de services voués à leur mieux-être, et ce, à leur profit, eux qui croulent sous les capitaux et les objets de luxe.

Deloitte, qui finance les recherches aux fins de la production de cet indice, est aussi au cœur d’une cynique et plus confidentielle documentation à destination des «High Net Worth Individuals»—euphémisme des institutions de pouvoir pour désigner les milliardaires jouissant des torts de la mondialisation capitaliste [voir «L’ère du bling»]. Cette «aide» et cet «outillage» fournis à de puissants Léviathans spoliant les peuples et épuisant ce qu’il leur reste de patrimoine économique (tels les investisseurs institutionnels et les entreprises multinationales dominant le monde avec le concours de despotes ou de chefs d’État complaisants), ne sont rien de moins qu’insultants pour l’intelligence.

On conclut alors que, tout ce temps, ce n’était pas nécessairement les données sur le PIB qui, comme telles, dérangeaient, mais l’importance, au titre de boussole idéologique, de tous ces «indicateurs», «indices», «classements» et «palmarès», quels qu’ils soient. En ajouter un autre ne règle rien du moment qu’on cerne le problème: le statut de l’indice lui-même. Ainsi, parmi tous les critères qu’elle a sélectionnés, l’organisation Social Progress Imperative n’a cherché à développer aucun coefficient, n’estimant pas qu’un de ses grands critères (matériels, cognitifs ou civiques) pouvait prévaloir sur un autre. S’il y en avait eu, de ces coefficients, c’eût été tout aussi problématique; mais de n’en prévoir aucun, au profit d’une simple moyenne, ne règle en rien la question de l’arbitraire des données et de leur caractère fictionnel. Valant pour un stade du miroir collectif auprès des populations, l’indice prétend à une conclusion avant même que le moindre débat public ni la moindre élaboration de discours politique aient pu avoir lieu, subordonnant des questions éminemment complexes à un simple outil de gestion, à une pauvre synthèse déjà consommée. Cela se révèle nécessairement médiocre, voire médiocrate au sens de l’élaboration d’une moyenne s’incarnant abusivement à titre d’autorité.

C’est ici la toute-puissance de l’indice et plus largement du benchmarking—des évaluations officielles autorisées—qui jure. Les livres critiques, heureusement, abondent aujourd’hui sur cette question. «L’évaluation est tellement systématique aujourd’hui qu’elle tend à se confondre avec l’action elle-même», peut-on ainsi lire dans l’ouvrage Statactivisme [voir encadré plus bas].

L’approche en cause pour l’élaboration de cet indice dit qualitatif se distingue peu de la vieille science économique qu’il s’agit prétendument de relever, en ce qu’elle exclut la vie elle-même de sa pensée, au sens où il est du propre de la vie de déjouer la signification affirmée de tels codes. L’idéologie libérale entendait stipuler un certain nombre de règles scientifiques, arithmétiques et axiologiques qui ordonneraient l’agir économique: «Les hommes ne sont pas libres d’inventer les lois et les institutions qui régiront leur interaction: celles-ci sont toutes faites, déterminées de toute éternité comme les lois de la physique, et il ne s’agit que de les observer», résume, critique, le penseur suisse Yves Citton.

Le discours officiel sur la qualité de vie ne se distingue pas fondamentalement de ce postulat. Il s’agit, une nouvelle fois, de subordonner le réel à des lois, des modes et des principes qui vont favoriser le devenir acceptable du capitalisme, plutôt que d’encourager sa critique et la participation citoyenne à l’élaboration d’un cadre de vie qui lui ressemble.

Revenons donc à l’expression elle-même: qualité de vie. Ne suppose-t-elle pas qu’il s’agit de qualifier la vie, de lui conférer, seul comme avec d’autres, des qualités? Quel que soit le dictionnaire que l’on consultera, le fait de qualifier plus que la qualité comme telle est une activité essentiellement réalisée par des sujets. Or, les indices nous fournissent, sous la forme d’un spectacle, une qualité de vie en réalité dévitalisée, séparée de tous, sans processus de qualification de la part des citoyens. Il leur faudrait accepter tel quel et considérer comme qualité ce que des experts patentés d’une ONG de Washington ont portraituré à ce titre. Mais comment donc une telle opération qualifiante pourrait-elle faire l’économie de l’activité subjective et de la participation des peuples à la vie institutionnelle et publique? Comment peut-on faire fondre cet ensemble complexe de considérations dans les seuls critères formels du «droit de vote» et de la vague «liberté d’expression», comme c’est le cas du Social Progress Imperative, sinon qu’en réitérant le geste de l’économisme chiffré, à savoir refouler hors champ tout ce qui nuit à l’élaboration d’un modèle fermé, rond et dogmatique?


Du besoin de tout chiffrer


Avant que le discours économique libéral n’occupe les consciences de façon aussi hégémonique, ses tenants devaient en justifier les thèses avec force arguments. C’était l’époque où les prémisses de ce qui tient lieu pour nous d’idéologie s’énonçaient clairement. Quelles étaient-elles? Hormis un postulat quasi mystique célébrant la liberté d’entreprendre et de commercer, il s’agissait de démontrer que seul ce qui était chiffrable relevait de l’économie et que celle-ci était à proprement parler une science.

Le physiocrate François Quesnay écrivait ainsi, fin 18e, que «les calculs sont à la science économique ce que les os sont au corps humain». Le moraliste Adam Smith prit le relais et accentua cette relation: était «productive» toute œuvre contribuant à la croissance d’un capital numéraire; l’épithète «non productif» était lui réservé au travail—domestique, curatif, culturel et intellectuel—qui n’en générait guère. Mais c’est Thomas Robert Malthus qui a le mieux explicité cette position. Selon lui, ne pouvait être considéré comme «richesse» que ce qui se laissait compter. Aussi brutalement que cela.

Les arts, les us, l’entregent et l’échange de bons procédés, les plaisirs charnels, l’émotion contemplative, rien de tout cela ne pouvait entrer en ligne de compte, puisque le discours devait correspondre aux critères de la science. Il fallait assoir l’autorité de cette nouvelle discipline et garantir son efficacité. Malthus craignait ainsi que «l’investigation de la nature et des causes de toutes ces sortes de richesses» sème «la plus grande confusion dans le langage dont l’économiste se sert». Ceux qui savaient compter profitaient de ce que la vie soit progressivement encodée dans une langue qu’ils maitrisaient à leur avantage.

Les livres critiques abondent sur cette approche qui s’est imposée dans notre culture. L’ouvrage collectif Statactivisme: comment lutter avec des nombres rappelle à quel point les statistiques sont un instrument de contrôle. «Argument d’autorité au service des managers de tout poil, elles mettent en nombres le réel et maquillent les choix politiques en vérités nimbées d’une aura mathématique. Et, en effet, lorsqu’on vous assène tableaux chiffrés, courbes, diagrammes et autres camemberts, comment lutter?» On regrette l’époque où les syndicats opposaient aux agences gouvernementales leurs propres données sur le chômage. À ne plus débattre des méthodes par lesquelles établir des chiffres, on donne libre cours à un monopole de l’élaboration de données qui servent souvent à justifier la concentration de pouvoir du domaine privé et à masquer l’inaction politique.


Diplômé en philosophie, Alain Deneault est l’auteur de plusieurs essais, dont Noir Canada, La médiocratie et De quoi Total est-elle la somme?, qui figurait sur la liste préliminaire des finalistes au Prix des libraires 2018. Son plus récent essai, Le totalitarisme pervers, est paru cet hiver aux éditions Écosociété. Depuis 2016, il est directeur de programme au Collège international de philosophie, à Paris.

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