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De scandale en scandale, la notion d’appropriation culturelle suscite l’ire des médias conservateurs, la folie sur les campus et la circonspection d’une partie de la population. Mais de quoi parle-t-on, au juste?
La poutine. L’identité canadienne. Hubert Aquin et la fatigue culturelle. Les chips Yum Yum. Le yoga. Les rastas. Le génocide amérindien. L’œuvre d’Edward Saïd.
En mai dernier, une polémique éclate chez les anglophones du pays, entrainant la démission du rédacteur en chef du magazine Write de la Writers’ Union of Canada. L’origine du scandale? L’éditorial d’un numéro consacré à la littérature autochtone, dans lequel Hal Niedzviecki propose à la blague un prix d’appropriation culturelle pour les auteurs qui choisissent d’écrire sur d’autres réalités que la leur.
«Mon avis va à l’encontre de la règle traditionnelle, écrit-il avec une belle innocence. Je dis: écrivez à propos de ce que vous ne connaissez pas. Explorez sans relâche la vie de gens qui ne sont pas comme vous, avec qui vous n’avez pas grandi, qui n’ont ni le même bagage que vous, ni le même compte en banque, ni les mêmes ambitions.»
Sans surprise, les premières critiques surviennent sur Facebook. Helen Knott, l’une des contributrices au numéro, répond au rédacteur en chef: «Je suis sérieusement dégoutée que quelqu’un se serve de l’édition sur les Autochtones comme d’un tremplin pour ses revendications à propos de l’appropriation culturelle, et qu’il le fasse sur le dos des mots et de la réputation des écrivains autochtones qui y ont contribué.»
Il n’en faut pas davantage pour que les médias et les blogues s’emparent de l’affaire. Un billet de Vice se trouve coiffé d’un titre subtil, comme souvent sur ce site web: «Une gang d’éditeurs canadiens blancs aiment vraiment l’appropriation culturelle.» Le Huffington Post opte pour «Chères personnes blanches, l’appropriation culturelle existe, même si vous n’y croyez pas». De son côté, le Toronto Star publie une tribune dans laquelle l’écrivain Navneet Alang avance que «le mainstream blanc prend non seulement le dessus, mais il met trop souvent de côté les voix des minorités et des Autochtones».
Dans les médias étiquetés plus à droite, les appuis embarrassants pour Niedzviecki se font sentir. Andrew Coyne, chroniqueur au National Post, écrit par exemple que «la présente controverse a moins à voir avec l’appropriation culturelle qu’avec l’impossibilité de débattre du concept». Au Québec, dans les pages du Journal de Montréal, Richard Martineau explique que «[l]e cancer de la rectitude politique continue de faire des ravages au sein de l’élite» tandis que la chroniqueuse Lise Ravary s’indigne du fait que «[l]es artistes privilégiés, comprenez blancs ou de classe moyenne, n’auraient plus le droit d’interpréter artistiquement les réalités de groupes “opprimés”».
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